Choc
Il y a une semaine, le mercredi matin, je me rends avec Suyun, Chinoise qui travaille au cabinet médical, à l'hôpital à côté de chez nous pour un bilan sanguin (rassurez-vous, tout va bien... Ma fatigue est juste ... de la fatigue justement !).
En arrivant dans le hall d'entrée, je vois un rassemblement de personnes qui, manifestement, sont mécontentes. Banderoles, tracts,... Je dis, en plaisantant, à Suyun: "Bu GaoXing" (Pas contents) en pensant à une grève de salariés ... Avec le recul, ce n'était pas très malin de ma part parce que, ici, on ne proteste pas pour une augmentation de salaire, de meilleures conditions de travail,... On n'est pas en France...
Bref...
Nous sommes en train de payer mes analyses (avant de les faire). Deux femmes se servent de barres de fer qu'elles tapent sur le sol pour exprimer leur mécontentement. Cela fait un bruit assourdissant dans ce hall très haut de plafond... Je n'arrive pas à comprendre qui sont ces gens et ce qu'ils veulent... Mes questions à Suyun restent sans réponse. Je n'insiste pas car je sais qu'elle ne me dira rien... Ils ne sont finalement pas si nombreux, ces manifestants : quatre personnes d'une cinquantaine d'années (deux hommes, deux femmes) et un homme plus jeune...
Le bruit incessant du fer sur le sol me stresse... L'atmosphère est lourd et je vois bien que Suyun, elle-même, n'est pas très à l'aise ce qui ne me rassure pas.
Tout à coup, un groupe d'une trentaine d'hommes tous dans la force de l'âge entre et se jette sur les manifestants. Ils commencent à littéralement les tabasser... La foule, dont je fais partie, regarde sans rien faire les cinq personnes se faire massacrer... Avec Suyun, paniquées, nous finissons par sortir à l'extérieur du bâtiment... bientôt suivies par les assaillants et leurs victimes. Nous sommes témoins d'une dernière scène d'une violence incroyable: l'homme plus jeune à terre se fait écraser la tête d'un coup de pied extrêmement violent... C'en est trop: nous nous réfugions dans la voiture...
Nous sommes toutes les deux choquées et en pleurs...
Pour ma part, je suis déboussolée... Une seule question me trotte dans la tête: POUQUOI ?
La scène en elle-même est très choquante mais les explications que Suyun va finir par me donner le sont encore plus...
Les cinq personnes qui viennent de subir ces violences sont, en fait, la famille d'une femme décédée dans cet hôpital en début de semaine en mettant au monde son bébé lui aussi décédé... Les parents, les beaux-parents et le mari veulent simplement parler au directeur (et obtenir réparation peut-être...) de l'hôpital qui refuse de les recevoir.
Ils étaient déjà là la veille et c'est la police qui est venue les déloger avec moins de violence me confie Suyun. Elle pense que c'est l'hôpital qui a fait venir les assaillants pour "donner une leçon" aux manifestants et les déloger durablement...
Pendant que Suyun me donne ces explications, nous voyons les agresseurs quitter tranquillement l'hôpital...
Une fois remises de nos émotions, nous retournons dans les locaux pour faire ce pour quoi nous sommes venues... Il ne reste dans le hall plus que des bouts de banderole éparpillés partout, une sandale, quelques lambeaux de tissu perdus dans la bataille et du sang bien sûr...
La police vient constatée tout ça avant que le service de nettoyage ne fasse son travail mais bien après le départ des "agresseurs"... Tout ceci est, visiblement, bien orchestré...
Cela fait plus de trois ans que nous vivons ici. Ce qui nous étonnait, nous surprenait au début fait maintenant parti de notre environnement quotidien.
Nous ne sommes pas "habitués" à tout mais, parfois, nous en arriverions presque à oublier certaines choses...
Et puis, tout à coup, un évènement nous rappelle que nous sommes quand même dans un pays où la vie humaine n'est pas si importante, où l'on meurt encore beaucoup en donnant la vie (ou pas), où les conflits ne se règlent pas à coup de procès mais à coup de poings...
J'ai été, vous l'aurez compris, très choquée par cette scène.
Malgré tout, c'est la première fois en trois ans que je suis confrontée à une telle violence, violence qui je pense est quotidienne... J'espère ne plus jamais avoir à le vivre.
Pour finir sur une note plus gaie et parce que 99,99% du temps, c'est à ça que nous avons affaire, voici une photo prise la même semaine, deux jours plus tard dans le centre commercial à côté de chez nous:
Ils se veulent "international" avec des panneaux traduits en anglais et en français; les traductions valent ici leur pesant de cacahouètes !
N.B: j'ai revu, lundi matin, Suyun qui m'a appris que les manifestants ne manifestent plus depuis mercredi dernier... Ont-ils réussi à voir le directeur ou pas ? Pour ma part, je pense que non...
En ce moment, avec Mathilde, nous sommes occupées à ça:
Voilà une des raisons qui fait que le blog est à l'abandon...
Prochain article à venir: Sidi, son équipe de basket et le tournoi auquel il participe actuellement...
Bon WE et @ bientôt !